Histoire des Idées et Critique Littéraire
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Quoiqu’il ait longtemps été défini par son indétermination, le roman est un genre fortement contraint, depuis ses origines, par l’exigence toute profane de se consacrer à l’imperfection humaine. S’inscrivant dans les marges des grands genres, l’épopée et la tragédie, il prend pour objet la dimension ordinaire de l’existence, souvent à travers des aventures amoureuses écrites dans un style qui tienne le milieu entre le sublime et le bas. En posant les jalons d’une nouvelle histoire du roman, Sylvie Thorel-Cailleteau montre comment prend forme cet art de la médiocrité, lié à l’exercice de la prose et dont les expressions varient : alors que, dans son acception classique, la médiocrité désignait la convenance de l’œuvre à un public choisi, elle tend par la suite à se confondre avec la vulgarité, sinon la trivialité, dont les romanciers du XIXe siècle tentaient d’extraire une saisissante beauté. Le genre romanesque a évolué jusqu’au point où son antique vocation de peindre ce qui est simplement humain le conduit à représenter la défaite des valeurs dont il se réclamait précédemment (l’amour, la vertu) et à montrer surtout notre condition mortelle. Au lieu de tisser ensemble des histoires consolantes, suivant l’ancienne formule, il en vient à dire exclusivement, ainsi dans les dernières œuvres de Beckett, l’élévation d’une voix funèbre.
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